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mercredi 21 mai 2025
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Binationaux écartés du gouvernement : une proposition qui divise le Parlement

Une proposition de loi enflamme les travées du Parlement marocain. Au cœur de la controverse: l’exclusion des marocains binationaux des fonctions ministérielles. L’initiative émane des députés du Parti de la Justice et du Développement (PJD), qui défendent une série d’amendements à la loi organique n° 065-13 encadrant l’organisation et le fonctionnement du gouvernement. Si elle venait à être adoptée, cette mesure pourrait profondément bouleverser la place des Marocains résidant à l’étranger (MRE) dans la gouvernance nationale.

Concrètement, le texte proposé vise à modifier les articles 31 et 33 de la loi en vigueur. Le premier amendement entend interdire l’accès aux fonctions ministérielles à toute personne disposant d’une double nationalité, ainsi qu’à celles qui ne jouissent pas pleinement de leurs droits civils et politiques. Une disposition qui viserait à garantir une “allégeance pleine et entière à la nation”, selon ses auteurs. Mais pour beaucoup, cette proposition fait craindre une marginalisation des MRE, pourtant souvent perçus comme des vecteurs de compétences, d’ouverture et d’influence internationale.

Les réactions ne se sont pas fait attendre. Si certains députés de la majorité (Rassemblement national des indépendants, Parti Authenticité et Modernité, Istiqlal) restent divisés sur la question, d’autres y voient une stigmatisation injustifiée de la diaspora marocaine. Plusieurs voix dénoncent une mesure à contre-courant des discours officiels valorisant le rôle stratégique des MRE dans le développement du pays. « Pourquoi refuser à un marocain de l’étranger ce droit fondamental, alors même qu’il contribue activement à l’économie nationale et qu’il reste profondément attaché à son pays d’origine ? », interroge un député de l’opposition.

Le second amendement proposé par le PJD porte sur l’article 33 de la même loi. Il impose à tout membre du gouvernement de se désengager totalement de ses activités économiques privées : cession d’actions, retrait de toute direction d’entreprise ou d’établissement privé, interruption de toute activité commerciale. Objectif : prévenir les conflits d’intérêts et garantir une impartialité absolue dans l’exercice des fonctions publiques.

Pour ses défenseurs, cette mesure s’inscrit dans un effort de moralisation de la vie publique et de lutte contre les connivences entre pouvoirs politique et économique. Mais pour ses détracteurs, elle pourrait dissuader les profils compétents issus du secteur privé de s’engager en politique.

Ce projet de loi soulève ainsi de multiples interrogations sur la nature de l’engagement politique, l’accès à la gouvernance et la représentation de la diaspora. Il intervient dans un contexte où le rôle des MRE dans la construction du Maroc moderne est souvent mis en avant, notamment par le Roi Mohammed VI lui-même, qui appelle régulièrement à une meilleure inclusion de ces marocains du monde dans les politiques nationales.

Alors que les débats se poursuivent au Parlement, une question demeure : le Royaume veut-il véritablement capitaliser sur la richesse de sa diaspora, ou préfère-t-il limiter l’accès à la haute fonction politique à ceux présents sur le sol national ? Les prochaines semaines s’annoncent décisives pour l’avenir politique des marocains binationaux.

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